carrières et carriers de grès du massif de Fontainebleau et alentours

Bien connus des amateurs de randonnée mais surtout d’escalade, les grès de Fontainebleau eurent longtemps une vocation tout autre : durant des siècles, ils ont été débités afin de servir à la construction, celle du palais et des maisons anciennes mais aussi pour le pavage des rues de la capitale grâce à la Seine qui en facilitait le transport. Aujourd’hui silencieuses, les multiples carrières ont laissé bien des traces qui font aujourd'hui partie du patrimoine. Ce blog propose de populariser toutes les initiatives qui visent à valoriser ou mieux faire connaître ce patrimoine auprès du grand public


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À propos des abris de carriers de grès dans le massif de Fontainebleau.

En cheminant dans les anciennes carrières de grès du massif de Fontainebleau, on découvre parfois de petits ouvrages en pierre sèche construits surtout avec des écales et situés à proximité des fronts de taille. Ce sont le plus souvent d’anciens abris ou « loges» (1) de carriers. Ces derniers, qui habitaient dans les villes et villages environnant la forêt et partaient tôt le matin pour la journée, utilisaient ces abris pour remiser leurs effets personnels (vêtements, nourriture…) et peut-être leurs outils. Selon des données recueillies en 2021 auprès des membres de la Commission Carrières et Carriers des Amis de la Forêt de Fontainebleau qui procèdent à leur inventaire depuis plus de 10 ans, plus de 300 abris, le plus souvent en ruine, ont été retrouvés parmi tous ceux qui furent construits au cours des siècles. En fonction de leur dimension, de leur forme, des modalités de construction, il est possible d’en distinguer plusieurs types. Un certain nombre sont aménagés sous platière ou s’adossent à une grotte naturelle que les carriers avaient pris soin de déblayer. Beaucoup d’autres, élevés en pierre sèche avec des écales et autrefois recouverts de branchages, sont totalement artificiels. S’il existe quelques abris « habitables », la plupart sont de petite taille et conçus pour abriter de deux à quatre personnes qui pouvaient s’assoir sur des bancs de blocs de grès posés au sol. Un certain nombre d’abris comportent des niches et une cheminée qui permettait de se réchauffer à la mauvaise saison. Ils servaient alors de « cantine » au moment des pauses pour le « casse-croûte ». Cependant rien dans les archives ne permet de penser que les carriers y passaient la nuit. La plupart avaient en effet une famille et ne craignaient pas une longue marche pour regagner leur domicile le soir venu.

Parmi ces abris, l’un, désormais unique de son espèce, a la forme d’une borie provençale. Muni d’un couloir d’accès, aménagé en réserve au milieu d’un monticule d’écales, il est surmonté d’une voûte en grès.  Cet abri exceptionnel, bâti dans une zone de carrières exploitées dans la seconde moitié du XIXème siècle, présente des signes de fragilité. Ces dernières années, de fréquents épisodes de sécheresse suivis de pluies abondantes se sont succédés.  Ils nous font craindre qu’un jour la voûte ne s’effondre comme c’est arrivé à un abri du même type qui se trouve non loin.  Nous avons donc pris l’initiative de le faire numériser – un grand merci à Samuel Praizelin – ce qui a l’avantage de permettre aux chercheurs de l’explorer en détail et aux curieux de le visiter virtuellement.  Patrick Dubreucq

Pour visiter virtuellement l’intérieur et l’extérieur de l’abri enterré cliquez sur les liens suivants :

(1) On trouve l’expression Loge aux carriers dans un récit de promenade rapporté par Louis-Michel Charon en 1849 : « Laure, apercevant de loin une excavation avait pris le devant ; elle arriva bientôt à une espèce de grotte située à gauche du sentier et au fond de laquelle se trouve un banc de pierre (…) deux hommes sortirent de la loge (…) que l’on connaît sous le nom de loge aux carriers ». La « Loge aux carriers » est un lieu remarquable mentionné dans les guides des sentiers de promenade des Amis de la forêt de Fontainebleau. Elle est située au Rocher des Demoiselles. Références de l’ouvrage :

Charon Louis-Michel, Promenade philosophique et sentimentale au sentier Bournet, édité chez Brochot, Fontainebleau, 1849 pp 81-83, 187 pages. Médiathèque de Fontainebleau, section Patrimoine cote A 1770 ou F.L. BR.5060